Conciliabule
Trois lapins, dans le crépuscule,Tenaient un long conciliabule.Le premier montrait une étoileQui montait sur un champ d’avoine.Les autres, pattes sur les yeux,La regardaient d’un air curieux.Puis tous trois, tête contre tête,Se parlaient d’une voix inquiète.Se posaient ils, tout comme nous,Les mêmes questions sans réponse ?D’où venons nous ? Où allons-nous ?Que sommes nous ? Pourquoi ces ronces ?Pourquoi dansons nous le matin ?Parmi la rosée et le thym ?Pourquoi avons nous le cul blanc,Longues oreilles, longues dents ?Pourquoi notre nez tout le temps,Tremble t il comme feuille au vent ?Pourquoi l’ombre d’un laboureurNous fait elle toujours si peur ?Trois lapins dans le crépusculeTenaient un long conciliabule.Et il aurait duré longtempsEncore si une grenouilleN’avait plongé soudainementDans l’eau de lune de l’étang.
Maurice Carême